Le riz est presque mur, pendant ce mois les moissons vont commencer. Les moissonneuses sur chenille vont pouvoir entrer dans les rizières qui ont étés vidées au mois d’août mais qui sont encore très humides, les machines vont laisser derrière elles des grosses ornières qu’il faudra faire disparaître dès que les sols seront secs. Pour cela seul le mistral sera capable de supprimer cette humidité. Les terres qui ont eu des cultures sèches seront nivelées au laser et à la lame niveleuse.
On finit les moissons, le riz est envoyé dans les silos de stockage dans les grandes rizeries qui vont le stocker, le sécher, le trier par variétés, et livraison par camion complet chez les négociants qui vont le conditionner en petites quantités pour une commercialisation de détail.
Ils seront consacrés à la préparation des sols des futures rizières, disquage, labour, hersage et nivellement au laser. C’est en avril que le travail proprement dit de la culture du riz va commencer.
Il faut passer les engrais, puis herser de nouveau pour les enterrer. Si la température le permet on va inonder les rizières. Il faut expliquer les mouvements d’eau. L’eau est tirée par de grosses pompes dans le Rhône et envoyée dans de grands canaux qui vont desservir une vingtaine de propriétés, les propriétaires se partageant les frais d’entretien et de gardiennage.
Chaque propriétaire ouvre de petites vannes appelées en Camargue “martelière” et dirige l’eau par d’innombrables petits canaux appelés “porteaux” jusqu'aux rizières qui vont se remplir.
C’est le mois le plus important, le plus critique et celui dont va répondre une grande partie de la future récolte. On va semer le riz dans l’eau avec les tracteurs équipés de roues en fer appelées roues squelettes. Par un travail de la terre en faible profondeur on a créé une semelle de terre très solide sur laquelle les roues ne s’enfoncent pas. Puis il va falloir traiter pour éviter la prolifération des mauvaises herbes qui, plus solides que le riz l’étoufferaient. Pendant cette période ou le riz va germer tous les ennemis du riz vont se précipiter sur les jeunes plantules pour les détruire. Mouches venant pondre des vermisseaux qui se délectent des jeunes germes. Algues vertes ou bleues qui viennent dévorer l’oxygène indispensable au riz, champignons attaquant les grains.
Le froid est l’ami de tous ces prédateurs c’est pourquoi il est si important que le temps soit chaud, sans vent ainsi la germination est rapide et forte et passe à travers tous ces pièges de la nature. A la fin mai, le riz sort de l’eau et les champs se colorent de vert tendre prémices de récolte normale ou abondante si le reste de l’année ne réserve pas de catastrophes. C’est en mai que l’on étend les produits qui vont détruire les mauvaises herbes. Produits performants mais a employer avec précision si l’on veut des résultats. Les hélicoptères travaillent à plein pour ce travail.
Les champs deviennent de vraies pelouses et on n’aperçoit plus l’eau. Il y a encore un passage d’azote dont va dépendre le nombre de grains par épi. Le travail est en grande partie la surveillance des niveaux d’eau qui suit la croissance du riz pour se stabiliser vers 10 centimètres.
Le riz grandit. Vers la fin du mois les premiers épis apparaissent sur les variétés les plus précoces, épis verts tendre qui vont fleurir en quelques jours et commencer leur fécondation.
Toutes les variétés vont fleurir à leur tour, et c’est un autre mois de grand danger car si la température descend au dessous de 14 degrés de nuit ou de jour les grains en nouaison périssent et ne donneront que des épis vides. On peut perdre une grande partie de sa récolte en quelques heures, d’ou la précaution de cultiver diverses variétés précoces ou tardives pour diluer les risques. Mais vers la fin du mois on commence à évaluer les rendements même si par une certaine superstition on ne se risque pas trop à citer des chiffres. On attend le verdict des moissonneuses.
C’est le cycle qui se termine. Les rendements en Camargue tournent autour de 6000 kilos à l’hectare avec d’énormes différence d’une terre à une autre. Quelque fois 9 tonnes par année magnifique et bonne terre et aussi 3 tonnes sur une autre parcelle.
En sachant qu’il faut en moyenne 5000 kilos à l’hectare pour amortir les frais de la culture qui est très chère. A la fin des moissons on peut savoir si on gagne ou l’on perd. Mais, chaque riziculteur est passionné par son métier et si l’année a été médiocre, on espère toujours que l’année qui vient sera meilleure.